L'art-déco à Charleville-Mézières : une richesse à découvrir...




Par rapport au mouvement précédent, les concepteurs des bâtiments art déco préfèrent une décoration plus sobre soulignant la structure, des motifs floraux ou animaliers en bas-relief. Cette architecture art déco adopte alors des lignes plus simples et plus géométriques tout en gardant une recherche ornementale nouvelle en opposition au style international (incarné par les créations de Le Corbusier) préférant les formes épurées avec des façades nues. Le style art déco décline une architecture avec des ouvertures en hauteur, des combles, souvent avec brisis et terrassons. Les façades sont habillées d’oriels, de balcons, de frontons. Les huisseries peintes en blanc sont très présentes dans la composition.
L’usage du béton offre une surface plus lisse et nue que la brique. Les corniches et linteaux de fenêtre sont couverts de hauts reliefs géométriques. Les représentations solaires avec rayons sont récurrentes.

Dans Charleville-Mézières, les constructions arts-déco constituent une richesse patrimoniale à faire connaître et à mettre en valeur. Nous avons la chance d’avoir un grand panel de bâtiments en termes d’usages (allant des constructions industrielles à l’habitat). Le plus grand nombre de ces bâtiments est principalement situé dans le quartier d’Arches et le quartier Gambetta.

Ces deux quartiers se sont développés dans les années 1920 pour des raisons différentes, l’un pour assainir l’ancien faubourg d’Arches (problématique hygiéniste et d’accès au confort moderne) qui est complètement reconstruit sur lui-même avec l’élargissement de la rue du faubourg d’Arches (qui deviendra l’avenue d’Arches) ; l’autre, parce qu’il constitue le secteur où des opportunités foncières se présentent. A cette époque, les deux villes ont des logiques de développement complètement indépendantes.

Dans le quartier d’Arches : les immeubles art-déco les plus remarquables sont situés le long de l’avenue d’Arches (du pont d’Arches à la place d’Arches), ainsi que le long de la Meuse sur la promenade de Dülmen et sur le quai Roussel. Dans le quartier Gambetta, les immeubles remarquables sont répartis sur l’ensemble du secteur ; mais on peut retenir comme exemple l’ensemble de constructions se trouvant à l’angle de la rue de Montjoly et du Boulevard Gambetta. Les particularités de l’art déco carolomacérien : les motifs en bas-reliefs sculptés sont très souvent déclinés sur la thématique des animaux de la forêt. L’avenue d’Arches est jalonnée de bâtiments aux couvertures originales : clochetons, dômes, lanterneaux qui participent à l’organisation du paysage urbain.


Boulevard Gambetta

Reconnaitre l’art-Déco

L’architecture art déco se caractérise par un certain nombre d’éléments qui contribueront à révéler la structure générale de l’immeuble. Les façades composées en travées sont souvent constituées d’oriels et de frontons dont les géométries se sont simplifiées depuis l’architecture haussmannienne.

Les combles sont généralement constitués comme les toitures à la “Mansart” de brisis et de terrassons. Parfois les toits sont plats avec des aménagements de pergolas portés par des colonnes abstraites rondes où se conjuguent la villa jardin et la mode hygiénique. Des baies d’une nouvelle forme voient le jour avec leur angle à pans coupés. Les fenêtres sont généralement en hauteur à l’opposé de l’architecture du mouvement moderne. Elles sont généralement sur une base de proportion du double carré. Les huisseries bois sont peintes en blanc et participent ainsi fortement à la composition d’ensemble.

Façade composée en travées



Bow-Window




Fenêtre à pans coupés


Fronton


Céramique


La sculpture trouve sa place en déclinant des motifs et thématiques nouvelles, en témoigne le grand foisonnement de bas-reliefs sur les balcons, frontons et linteaux. Les motifs décoratifs sont beaucoup plus géométriques : roses, vasques, amphores… Parfois certains édifices arborent des motifs au dessin plus abstrait. Les colonnettes engagées, en bas-reliefs, constituent un élément décoratif couramment utilisé par le style “art déco”. Les revêtements décoratifs sont également très présents comme la mosaïque ou la céramique et rappellent l’engouement de l’époque pour les matériaux hygiéniques faciles à entretenir. Il est important de noter le travail remarquable de la ferronnerie, la fonte est abandonnée au profit du fer martelé, technique qui sera le fruit d’une grande créativité chez les artisans.

Bas-relief support de balcon


Vitrail



Le travail de la ferronnerie

Les portes en fer martelé sont encore nombreuses dans notre ville : elles constituent un patrimoine remarquable qu’il est nécessaire de préserver et de mettre en valeur. Elles sont situées principalement sur l’avenue d’Arches et sur le quai Roussel. Elles constituent un travail d’une grande originalité dans le dessin. Mais n’oublions pas tous ces balcons, garde-corps, clôtures qui constituent autant de pièce unique, fruit d’un savoir-faire exceptionnel.

Porte Boulevard Gambetta


Porte avenue d’Arches




Des menuiseries bois très soignées

La menuiserie bois est très soignée. Les portes d’entrée lorsqu’elles sont en bois constituent un réel travail d’ébénisterie et de ferronnerie (protégeant des panneaux vitrés translucides). Les éléments de serrurerie sont en laiton. Les portes d’entrée en bois sont généralement vernies. A contrario les fenêtres sont en bois peintes en blanc souvent avec la proportion du double carré.

Porte en bois verni avec ferronneries




Roses sculptées




Des frontons raffinés

La partie haute de la façade est souvent terminée par un élément en pierre, le fronton, qui marque souvent la travée principale. Ces frontons sont généralement sculptés de bas-relief ou agrémentés de décors plus géométriques comme des petites colonnettes engagées. Parfois la brique va jouer de sa modénature pour participer à la composition d’ensemble.

Immeuble avenue d’Arches



Fronton au-dessus d’une loggia avenue d’arches



Détail de fronton




La pierre sculptée : les bas-reliefs

Les compagnons tailleurs de pierre des années vingt font preuve d’un grand savoir-faire. Les bas ou haut reliefs, qu’ils soient d’inspiration florale ou plus abstraits, sont d’une très grande qualité et d’une très grande finesse. Certains motifs sont récurrents : les roses ou feuilles aux dessins géométriques, les mascarons que l’on retrouve le plus souvent en clef de linteau ou comme support de balcon, les vasques, vases ou amphores.




La mosaïque et la céramique

Après l’épidémie de grippe espagnole, la problématique hygiéniste est très présente dans la société, l’utilisation de la mosaïque et de la céramique vernissées en est pour une partie la traduction. Ces matériaux apportent également une grande liberté de création au niveau des motifs et la possibilité d’introduire la couleur.



Un patrimoine civil :

Les bains-douches rue Couvelet


Ce bâtiment, inscrit à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques, constitue un bel exemple de construction civile de style art déco. La présence de céramique vernissée avec différentes nuances de bleu mises en valeur par des caissons bordés de colonnette donne une belle singularité à ce bâtiment et anime sa forme générale d’une grande sobriété.

Le portail du stade du Petit-Bois


Ce portail monumental des années 20 donne plusieurs lectures, tout d’abord un ordre monumental, signalant clairement l’entrée du stade et une seconde lecture plus ludique avec une série de ferronnerie illustrant des personnages en action. On notera la qualité de ce travail de ferronnerie ainsi que la présence de céramiques qui viennent habiller le portail en béton.

Un patrimoine commercial

 8 rue de la République



Ce magasin, conçu à l’origine sur deux niveaux, boutique alimentaire en RDC et cabaret à l’étage garde de beaux décors art déco : des bas-reliefs, des vasques remplies de fleurs, un garde-corps de roses ainsi que des pilastres latéraux constitués de petites colonnettes engagées portant le linteau à pans coupés de la fenêtre.

Patrimoine commercial chaussée de Sedan



Cet ancien garage, d’une grande sobriété au niveau de sa forme a été construit plus tardivement dans les années 30. Son écriture architecturale plus épurée met en valeur la structure porteuse et rappelle le style international. Le grand auvent en béton est percé de pavés de verre dessinant une sorte de claustra horizontal.

Patrimoine industriel : l’usine Deville




Ce bâtiment très présent dans le paysage urbain constitue un élément remarquable du patrimoine art déco. Sur le fronton, les ouvertures à pans coupés supportent des lettres imposantes. La partie haute de la façade est traitée avec un balcon filant sur les quatre façades.

Les immeubles de rapport :

46 boulevard Gambetta


Cet immeuble à parement de pierre de taille constitue un bel exemple art déco du quartier Gambetta. Tous les éléments d’origine sont encore préservés : porte d’entrée aux ferronneries remarquables, menuiseries bois, fronton sculpté (en détail), bas-reliefs en traitement d’attique.

24 avenue d’Arches :



Au 24 avenue d’Arches, vous trouverez un des plus beaux exemples d’immeubles art-déco sur la ville constituant un archétype. La thématique animalière est encore évoquée sur ce bâtiment avec des faisans posés sur une vasque remplie de fleurs. Le tout finement sculpté. Les dessins des garde-corps des balcons représentent des fontaines différentes à chaque niveau. Les frontons sculptés de feuilles dans l’axe de chaque travée viennent assurer le traitement d’attique.

Les maisons

 5 rue Colette



Cette maison, petite par ses dimensions, n’en est pas moins riche des sculptures remarquables. Sur la limite de chaque mitoyen, en RDC, on observe deux sculptures évoquant les arts (la musique et la peinture). Passions du concepteur ? Du commanditaire ? La partie haute est traitée, dans l’axe de la travée principale, par un fronton sculpté représentant des amphores remplies de roses où sont venus se percher des paons.

29 av de Saint-Julien



Cette maison bourgeoise située en retrait de l’avenue possède de très belle ferronnerie d’une écriture non figurative : clôture et garde-corps. Le mascaron qui porte le bow-window représente la tête d’une femme dont le style est contemporain des années 20 : cheveux courts, formant de petites colonnettes.



43 rue de Montjoly




La brique est souvent présente dans les constructions des années 20, elle constitue un matériau bon marché. Pour cette maison, tous les éléments structurants de la façade (linteaux, balcons…) sont travaillés en bas-reliefs et donnent toute la qualité à cette construction. On notera également les fenêtres à pans coupés caractéristiques.


17 rue Lamartine



Dans l’architecture art déco, les façades sur rue sont généralement plus travaillées que les façades latérales ou à l’arrière, privilégiant ainsi une logique de représentation. Les bas-reliefs en béton sont particulièrement soignés (tête de lions, frises de feuilles au dessin géométrique).


Source : Ville de Charleville-Mézières